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MONARCHIE UNIVERSELLE

les Montagnes et les Mers ; & comme elle est plus au Midi, les Fleuves moins grossis y forment de moindres barrières[1].

Un grand Empire suppose nécessairement une autorité despotique dans celui qui le gouverne, il faut que la promtitude des resolutions supplée à la distance des lieux où elles sont envoyées, que la crainte empêche la négligence du[2] Gouverneur & du Magistrat éloigné, que la Loi soit dans une seule tête, c’est à dire, changeante sans cesse, comme les accidens qui se multiplient toujours dans l’Etat à proportion de sa grandeur[3].

Sans cela[4], il se feroit un démembrement des parties de la Monarchie ; & les divers Peuples, lassés d’une domination qu’ils regarderoient comme étrangère, commenceroient à vivre sous leurs propres Loix[5]. La Puissance doit donc être toujours despotique en Asie, car si la servitude n’y étoit pas extrême, il se feroit d’abord un partage que la nature du pais ne peut pas souffrir.

  1. Montesquieu a ajouté en marge : « Les montagnes y sont moins couvertes de neige. »
  2. Il faut nécessairement dans un vaste Empire de grandes Armées toujours éloignées, souvent inconnues du Prince. (M.)
  3. Montesquieu a écrit : « Mis dans les loix. » (V. 1. VIII, ch. xix de l’Esprit des Lois.
  4. L’Exemple de la Monarchie d’Espagne n’est pas contraire à ce que je dis, car les Etats d’Italie & de Flandre étoient gouvernés par leurs Loix, & étoient payés pour leur dépendance par des sommes immenses que les Espagnols leur apportoient, & les Indes sont retenues par une chaîne d’une espèce particulière. (M) — Montesquieu a écrit en marge : « Mis dans les Loix. »
  5. « Mis dans les Loix. »