Page:Montesquieu - Esprit des Lois - Tome 1.djvu/488

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impétuosité. Quand ils espéroient de vaincre, ils combattoient ; ils augmentoient l’armée des plus forts, quand ils ne l’espéroient pas. Avec de pareilles coutumes, ils trouvoient qu’il étoit contre leur droit des gens qu’une ville, qui ne pouvoit leur résister, les arrêtât : ils ne regardoient pas les villes comme une assemblée d’habitans, mais comme des lieux propres à se soustraire à leur puissance. Ils n’avoient aucun art pour les assiéger, & ils s’exposoient beaucoup en les assiégeant ; ils vengeoient par le sang tout celui qu’ils venoient de répandre.


CHAPITRE XXI.

Loi civile des Tartares.


LE pere du Halde dit que, chez les Tartares, c’est toujours le dernier des mâles qui est l’héritier ; par la raison qu’à mesure que les ainés sont en état de mener la vie pastorale, ils sortent de la maison avec une certaine quantité de bétail que le pere leur donne, & vont former une nouvelle habitation. Le dernier des mâles, qui reste dans la maison avec son pere, est donc son héritier naturel.

J’ai oui dire qu’une pareille coutume étoit observée dans quelques petits districts d’Angleterre : & on la trouve encore en Bretagne, dans le duché de Rohan, où elle a lieu pour les rotures. C’est, sans doute, une loi pastorale venue de quelque petit peuple Breton, ou portée par quelque peuple Germain. On sçait, par César & Tacite, que ces derniers cultivoient peu les terres.