Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t1, 1899.djvu/201

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337* (180o. III, f° 78 v°). — Commerce. — Qu’il est souvent utile aux Peuples qui cultivent les Arts que d’autres les cultivent aussi. — L’établissement des manufactures chez des nations qui n’en avoient pas ne doit point si fort alarmer celles qui en ont. Les premières achètent peu ; mais, si elles établissent 5 des manufactures, elles seront bientôt en état de se procurer celles qu’elles ne peuvent imiter, et qui entreront d’abord dans leurs besoins.

Les Hongrois étoient pauvres. Ils n’avoient point de manufactures ; ils n’achetoient que trois ou to quatre habits dans leur vie ; ces habits étoient d’un très vil prix et sembloient n’avoir été faits que pour l’épargne. Que la Hongrie trouve ou qu’on lui donne quelque moyen de s’enrichir, on y verra bientôt toutes les marchandises de l’Univers. 15

338*(1799.III,f°78).— Commerce. — Les conquêtes sont plus propres à établir partout les mêmes mœurs qu’à en donner de bonnes.

Ce fut un des inconvénients de la conquête de l’Univers par les Romains que ce nombre infini 20 de peuples qu’ils soumirent prirent les mœurs romaines, et que chaque peuple perdit le caractère original qu’il tenoit de son esprit général. Les conquêtes des Espagnols dans l’Amérique ont métamorphosé en Espagnols tous les peuples de 25 cette partie du Monde.

Il y a bien de la différence entre les mœurs que le commerce inspire, et celles qu’une vaste conquête force de prendre.