Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t1, 1899.djvu/213

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de ce qu’ils ont, et qui te verroient traîner dans les rues avant de t’offrir 10 ducats. Il y a des expédients pour tout. Je les ferai enlever tous dans une nuit, on les chargera de chaînes, et ils recevront tous les jours cent coups de bâtons 5 jusqu’à ce qu’ils ayent déclaré leur argent. Nous leur donnerons à la place un papier qui sera signé par les six plus anciens officiers de la milice. Je ne doute pas que nous ne donnions un furieux échec aux banques d’Europe, qui ne peuvent guère 10 se soutenir, parce que les négociants qui les forment morguent (?) sans cesse le Gouvernement et sont, sans courage, insolents comme des janissaires ; au lieu que nos gens seront très souples. Si ce projet réussit, j’en ai un autre qui fera encore plus i5 d’honneur à la nation algérienne. C’est d’établir une Compagnie des Indes. Tes femmes seront couvertes de pierreries, et tu verras couler chez toi des fleuves d’or. — Mahomet, serviteur du Dieu puissant, soit à ton aide! > 20

Il s’assit. Un vieux conseiller se leva, et, après avoir mis ses mains sur sa poitrine, incliné son dos, baissé sa tête, il dit d’une voix plus basse:

« Seigneur, je n’approuve point le projet de ton ministre : si la milice savoit que tu eusses de l’ar- 25 gent, elle t’étrangleroit le lendemain. »

Il s’assit, et le Dey congédia l’assemblée.

354* (1739. III, f° 54 v°). —_5«r le Crédit public dans le Gouvernement populaire. — Ceux qui gouvernent sont ordinairement plus ménagers de 30