Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t1, 1899.djvu/24

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de bassesse où elle pouvoit descendre. Une grande âme qui s’abaisse est au plus haut point de la grandeur1. »

Enfin, dans les conseils A mon Petit-Fils, nous détachons cette phrase:

« Sachez aussi que rien n’approche plus des sentiments bas que l’orgueil, et que rien n’est plus près des sentiments élevés que la modestiea. »

Nous ne continuerons point nos citations: celles que nous venons de faire permettront de saisir le lien intime qui rattache la politique de Montesquieu à sa morale.

Si l’Homme est un être médiocre, rien d’extrême ne lui convient.

Pour les particuliers, il n’est pas bon qu’ils disposent d’une liberté absolue ou de richesses immenses.

C’est un danger pour des autorités publiques que d’avoir une puissance à laquelle des lois fixes et les attributions d’autres magistrats n’assignent point de limites.

Et, pour les états eux-mêmes, les grandes conquêtes, les extensions indéfinies sont, tôt ou tard, une cause de ruine.

On peut critiquer, rejeter cette manière de voir, la juger mesquine et bourgeoise; on ne saurait en méconnaître l’unité rigoureuse et logique.

Notons qu’à la différence de tant de faux modestes, Montesquieu, en humiliant le Genre humain, ne crée point une catégorie d’hommes exceptionnels, dans laquelle il se rangerait naturellement.

V

Passons, maintenant, du philosophe à l’auteur. Les Pensées et Fragments inédits découvrent dans Montesquieu un artiste très conscient de son art: de l’art

1. Pensées (manuscrites), tome II, folio 108 v°.

2. Pensées (manuscrites), tome III, folio 359 v°.