Page:Montesquieu - Pensées et Fragments inédits, t1, 1899.djvu/264

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jours que nos modernes, en cherchant le grand, perdent le simple, ou, en cherchant le simple, perdent le grand. Il me semble que je vois, dans les uns, de belles et vastes campagnes, avec leur sim5 plicité, et, dans les autres, les jardins d’un homme riche, avec des bosquets et des parterres.

Je vous prie de voir la plupart des ouvrages des Italiens et des Espagnols. S’ils donnent dans le grand, ils outrent la nature, au lieu de la peindre, 10 S’ils donnent dans le simple, on voit bien qu’il ne s’est pas présenté à eux, mais qu’ils l’ont recherché, et qu’ils n’ont tant d’esprit que parce qu’ils manquent de génie.

452* (1 18.1, p. m). — De tous les genres de poé

i5 sies, celui où nos modernes ont, à mon gré, égalé les Anciens, c’est le poëme dramatique. Je crois en deviner la raison. C’est que le système payen y entre pour beaucoup moins. Cette sorte d’ouvrage est de sa nature le mouvement même. Tout y est

  • o pour ainsi dire en feu. Il n’y a ni récit, ni rien d’historique, qui ait besoin de secours étranger. Tout y est action. On y voit tout ; on n’y entend rien. La présence des Dieux seroit trop choquante et trop peu vraisemblable. C’est plutôt un spectacle

^5 du cœur humain que des actions humaines. Ainsi il a moins besoin de merveilleux.

Je ne dis pourtant pas que le système payen n’y influe pour beaucoup: car très souvent l’esprit et presque toutes les idées principales ou accessoires

30 en dérivent ; témoin le commencement de la Mort T. i, ag