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Liv. IV. Chap. VIII.

Théophraste, Plutarque[1], Strabon[2], tous les anciens, ont pensé de même. Ce n’est point une opinion jetée sans réflexion ; c’est un des principes de leur politique[3]. C’est ainsi qu’ils donnoient des lois, c’est ainsi qu’ils vouloient qu’on gouvernât les cités.

Je crois que je pourrois expliquer ceci. Il faut se mettre dans l’esprit que dans les villes Grecques, sur-tout celles qui avoient pour principal objet la guerre, tous les travaux & toutes les professions qui pouvoient conduire à gagner de l’argent, étoient regardées comme indignes d’un homme libre. « La plupart des arts, dit Xénophon[4], corrompent le corps de ceux qui les exercent ; ils obligent de s’asseoir à l’ombre ou près du feu : on n’a de temps ni pour ses amis, ni pour la république. » Ce ne fut que dans la corruption de quelques démocraties que

  1. Vie de Pélopidas.
  2. Liv. I.
  3. Platon, liv. IV. des lois, dit que les préfectures de la musique & de la gymnastique sont les plus importans emplois de la cité ; & dans sa république, liv. III. « Damon vous dira, dit-il, quels sont les sons capables de faire naître la bassesse de l’ame, l’insolence, & les vertus contraires. »
  4. Liv. V. Dits mémorables.