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Liv. XXXI. Chap. XX.

béissance ; c’étoit confondre les droits divers des princes, dans un temps sur-tout où, les forteresses étant rares, le premier rempart de l’autorité étoit la foi promise & la foi reçue.

Les enfans de l’empereur, pour maintenir leurs partages, solliciterent le clergé, & lui donnerent des droits inouis jusqu’alors. Ces droits étoient spécieux ; on faisoit entrer le Clergé en garantie d’une chose qu’on avoit voulu qu’il autorisât. Agobard[1] représenta à Louis le débonnaire qu’il avoit envoyé Lothaire à Rome pour le faire déclarer empereur ; qu’il avoit fait des partages à ses enfans, après avoir consulté le ciel par trois jours de jeûnes & de prieres. Que pouvoit faire un prince superstitieux, attaqué d’ailleurs par la superstition même ? On sent quel échec l’autorité souveraine reçut deux fois, par la prison de ce prince & sa pénitence publique. On avoit voulu dégrader le roi, on dégrada la royauté.

On a d’abord de la peine à comprendre comment un prince, qui avoit plusieurs bonnes qualités, qui ne manquoit pas de lumieres, qui aimoit natu-

  1. Voyez ses lettres.