Page:Montfort - Un cœur vierge.djvu/106

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sur elle. Et jusqu’en cet îlot perdu, sa mère, qui l’avait élevée, avait dû conserver ses anciennes habitudes de femme élégante : Anne était fraîche et nette comme une Anglaise, sa robe était immaculée.

Je ne savais plus si je dormais, si j’étais éveillé. Mon songe m’emportait. Anne était penchée sur moi : je me perdais dans ses yeux. Sur son visage, j’épiais la moindre de ses impressions : tout s’y lisait. Un sourire voltigeait sur ses lèvres enfantines : il se posait à peine, puis s’envolait. L’âme s’ouvrait entièrement, puis soudainement se repliait, infiniment confiante, infiniment farouche. Mon regard la caressait, la flattait, la charmait, mais parfois, subitement, elle restait interdite, vaguement effrayée, parce que je lui avais souri avec trop de douceur, que mes yeux avaient été trop tendres ou ma voix trop tremblante. Alors, je prenais bien garde de ne pas recommencer, pour la rassu-