— Avantage ? répondit-il vivement… certes, vous avez raison. C’en est un. Et aujourd’hui, grâce à cette expérience… spéciale… je puis vous affirmer que le baron de Cénac est perdu. S’il en réchappe, il ne faudra s’en prendre qu’à mon traitement anti-septique, à mon pansement métallique…
Du coup, tous les médecins présents oublièrent leur vieille haine contre le Docteur-Noir, pour combattre l’académicien Baudinet.
Ils le jalousaient sourdement.
— Permettez, fit l’un d’eux, vous exagérez l’importance…
— Comment ! s’écria le docteur Baudinet comme s’il entendait un blasphème. Mais voulez-vous avoir un érysipèle… Et les miasmes ?
— J’aimerais mieux ça que de laisser une blessure baigner dans son pus. Le pansement que je préconise…
— Je le connais, hurla M. Baudinet, et l’Académie aussi ; elle l’a rejeté.
— J’ai fait des expériences en plein air pour la guérison des plaies.
— Et elles ont été concluantes ?
— Oui, monsieur Baudinet, oui, oui, oui !
— Je le nie. Où avez-vous expérimenté ?
— Dans la salle de l’infirmerie des prisons.
— Dites dans votre Morgue, plutôt. Je vous le répète, l’Académie vous condamne…
— Que m’importe !
— Vous n’avez pas le droit de dire cela.
— Je le dis, cependant.
— N’insultez pas l’Académie de Médecine, monsieur !
— Un tas de vieux croûtons.
Du coup, M. Baudinet suffoqua.
Il chercha quelque terrible riposte :
— Vous êtes un médecin officiel, vous, monsieur, éjacula-t-il avec frénésie.
— Je m’en flatte, répondit l’autre.
— Un médecin administratif.
— C’est vrai, j’en suis fier.
— Il n’y a pas de quoi. À chacune de vos expertises légales, — je ne dis pas médicales…
— Vous ne dites pas médicales ?
— Non, monsieur, je dis légales.
— Eh bien, quoi ?
— Vous ne voyez partout que des traces d’arsenic. Vous avez sué la conscience plus de trois siècles de travaux-forcés appliqués injustement sur votre rapport.
— Moi ? gronda à son tour le médecin si cruellement pris à parti.