Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies II.djvu/66

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péché pour une si belle cause, cela est tentant, n’est-il pas vrai, Ricciarda ? Presser ce cœur de lion sur ton faible cœur tout percé de flèches saignantes, comme celui de saint Sébastien ; parler, les yeux en pleurs, pendant que le tyran adoré passera ses rudes mains dans ta chevelure dénouée ; faire jaillir d’un rocher l’étincelle sacrée, cela valait bien le petit sacrifice de l’honneur conjugal, et de quelques autres bagatelles. Florence y gagnerait tant, et ces bons maris n’y perdent rien ! Mais il ne fallait pas me prendre pour confesseur.

La voici qui s’avance, son livre de prières à la main. Aujourd’hui donc tout va s’éclaircir ; laisse seulement tomber ton secret dans l’oreille du prêtre : le courtisan pourra bien en profiter ; mais, en conscience, il n’en dira rien.

Entre la marquise de Cibo.
Le Cardinal, s’asseyant.

Me voilà prêt.

La marquise s’agenouille auprès de lui sur son prie-Dieu.
La Marquise.

Bénissez moi, mon père, parce que j’ai péché.

Le Cardinal.

Avez-vous dit votre Confiteor ? Nous pouvons commencer, marquise.

La Marquise.

Je m’accuse de mouvements de colère, de doutes irréligieux et injurieux pour notre saint-père le pape.