Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies II.djvu/99

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pons-le par morceaux, et mangeons, mangeons ! J’en ai jusqu’au coude. Fouille dans la gorge, roule-le, roule ! Mordons, mordons, et mangeons !

Il tombe épuisé.
Scoronconcolo, s’essuyant le front.

Tu as inventé un rude jeu, maître, et tu y vas en vrai tigre ; mille millions de tonnerres ! tu rugis comme une caverne pleine de panthères et de lions.

Lorenzo.

Ô jour de sang, jour de mes noces ! Ô soleil, soleil ! il y a assez longtemps que tu es sec comme le plomb ; tu te meurs de soif, soleil ! son sang t’enivrera. Ô ma vengeance ! qu’il y a longtemps que tes ongles poussent ! Ô dents d’Ugolin ! il vous faut le crâne, le crâne !

Scoronconcolo.

Es-tu en délire ? As-tu la fièvre, ou es-tu toi-même un rêve ?

Lorenzo.

Lâche, lâche, — ruffian, — le petit maigre, les pères, les filles, — des adieux, des adieux sans fin, — les rives de l’Arno pleines d’adieux ! — les gamins l’écrivent sur les murs. — Ris, vieillard, ris dans ton bonnet blanc ; — tu ne vois pas que mes ongles poussent ? — Ah ! le crâne ! le crâne !

Il s’évanouit.
Scoronconcolo.

Maître, tu as un ennemi.

Il lui jette de l’eau à la figure.