Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Mélanges de littérature et de critique.djvu/416

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et de Casimir Delavigne. Il avait, non seulement accepté, mais désiré cette mission qu’il eût si dignement remplie. L’attaque subite d’un mal cruel le retient en ce moment même où il achevait, pour vous l’apporter, une page qui, nous l’espérons, ne sera point perdue. Serait-ce à moi, pris au dépourvu, arrivé d’hier dans vos murs, d’essayer de prendre la place de M. de Salvandy ? Si elle m’eût appartenu, je ne sais ce que j’aurais pu dire en face de ces deux hommes illustres dont votre grande et noble cité est fière à de si justes titres. Aurais-je pu assez admirer la poésie pleine de vérité, la grâce pleine de tendresse, qui respirent partout dans Paul et Virginie ? Aurais-je su assez apprécier cette autre poésie et cet autre charme des Vêpres siciliennes et de l’École des vieillards, cette fermeté, cette pureté de style que Casimir Delavigne possédait si bien ; cette faculté précieuse, qui a fait dire à Buffon « Le génie, c’est la patience » ? Aurais-je su vous dire qu’au milieu de sa gloire il aima toujours son pays natal, qu’il n’en parlait qu’avec effusion, avec attendrissement ? C’est ainsi que l’oiseau des mers, planant au loin dans l’azur des cieux, jette pourtant toujours un regard sur la vague où flotte son nid.

Mais, messieurs, vous n’attendez pas que je vous entretienne de pareils sujets sans réflexion, sans travail, sans étude ; vous ne voudriez pas me voir impro-