Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Poésies II.djvu/105

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Balance le zéphyr dans son voile odorant.
La rose, vierge encor, se referme jalouse
Sur le frelon nacré qu’elle enivre en mourant.
Écoute ! tout se tait ; songe à ta bien-aimée.
Ce soir, sous les tilleuls, à la sombre ramée
Le rayon du couchant laisse un adieu plus doux.
Ce soir, tout va fleurir : l’immortelle nature
Se remplit de parfums, d’amour et de murmure,
Comme le lit joyeux de deux jeunes époux.


le poète

     Pourquoi mon cœur bat-il si vite ?
     Qu’ai-je donc en moi qui s’agite
     Dont je me sens épouvanté ?
     Ne frappe-t-on pas à ma porte ?
     Pourquoi ma lampe à demi morte
     M’éblouit-elle de clarté ?
     Dieu puissant ! tout mon corps frissonne.
     Qui vient ? qui m’appelle ? — Personne.
     Je suis seul ; c’est l’heure qui sonne ;
     Ô solitude ! ô pauvreté !

 

la muse

Poète, prends ton luth ; le vin de la jeunesse
Fermente cette nuit dans les veines de Dieu.
Mon sein est inquiet ; la volupté l’oppresse,
Et les vents altérés m’ont mis la lèvre en feu.
Ô paresseux enfant ! regarde, je suis belle.