Page:Musset - Biographie d’Alfred de Musset, sa vie et ses œuvres.djvu/333

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elles battent des mains et lui montrent sa malle qu’elles avaient enlevée dans le désordre de l’embarquement. Son départ est retardé de quelques heures ; on en témoigne tant de joie qu’il reste au Havre deux jours de plus.

À l’automne, en rentrant chez lui, il trouve, un soir, la carte de M. Lyster. Le voilà enchanté. Le lendemain, il se met en route pour aller revoir ses amis du Havre. Ils étaient logés aux Champs-Élysées. Un beau soleil, un temps doux l’invitaient à la promenade. Chemin faisant, le long de la grande avenue, il réfléchit sur la différence entre les relations de la ville et celles des bains de mer. On ne retrouve plus, dans une visite et à Paris, cette aimable facilité de mœurs qui fait le charme de la vie en commun. On croit avoir mille choses à se dire, et, quand on est revenu sur les souvenirs et les plaisirs passés, on s’aperçoit qu’on se connaît à peine. « Il y aura près de ces demoiselles, pensait le poète en ralentissant le pas, d’autres amis, des compatriotes, peut-être un prétendu pour l’une d’elles. Je ne serai plus qu’un visiteur quelconque, peut-être un importun. Adieu la douce familiarité, la gaieté, les badinages d’enfants ! Et suis-je bien sûr d’apporter moi-même l’entrain et le laisser-aller des bords de la mer ? Tout à l’heure peut-être je reviendrai chez moi par cette avenue, regrettant une illusion perdue, un charmant souvenir défloré. Je ferais