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littérature, en politique, en philosophie, ils n’étaient pas toujours d’accord. Au jeu des échecs ou au piquet, ils se querellaient parfois et se séparaient fâchés. Le lendemain, Alfred écrivait une lettre d’excuses, et, le soir, on s’abordait sans dire mot de la discussion de la veille. Souvent, à l’instant même où la lettre d’excuses allait partir, le bon oncle arrivait, pensant que les torts étaient de son côté. Henri IV et d’Aubigné n’en faisaient pas d’autres. Leurs brouilles et leurs raccommodements, dit Sully, étaient comme d’amant à maîtresse. Cette amitié passionnée dura jusqu’à la mort.

Dans son discours de réception à l’Académie, Alfred de Musset a dit : « Je ne me suis jamais brouillé qu’avec moi-même. » La rancune, en effet, lui était impossible. Quand des dissentiments littéraires l’eurent éloigné du Cénacle, il se crut en froid avec M. Victor Hugo, et c’était pour lui un vrai chagrin. Un jour, au printemps de 1843, les deux poètes se rencontrèrent à un déjeuner chez M. Guttinguer. Ils s’avancèrent l’un vers l’autre en se tendant la main, et causèrent gaiement ensemble, comme s’ils se fussent quittés de la veille. Alfred fut si touché de ce bon accueil qu’il écrivit le beau sonnet qui en a rendu le souvenir immortel : Il faut dans ce bas monde aimer beaucoup de choses.

Parmi les femmes de Paris les plus distinguées par l’esprit, le goût, la beauté, l’élégance, j’en pour-