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tère qu’on verra bientôt grandir et se modifier.

L’hiver de 1829 s’écoula rapidement au milieu de cette vie compliquée, mais où l’étude et les lectures avaient une large part. La muse descendait par moments, à l’improviste, et, quand elle arrivait, elle était bien reçue. Parmi ses compagnons de plaisir, Alfred eut le bonheur de trouver un véritable ami. Alfred Tattet, justement du même âge que lui, débutait aussi dans le monde. C’était un aimable viveur, gai convive, sérieux à ses heures, exagéré dans son langage, trouvant toutes choses ravissantes ou exécrables, mais encore plus avide des plaisirs de l’esprit que des autres plaisirs, et toujours prêt à s’exalter pour un beau vers. Il obtint sans peine communication des productions de son ami, et, afin de l’entendre plus souvent, il donna de petites soirées et matinées esthétiques. C’est là que Musset connut Ulric Guttinguer, qui l’emmena un jour au Havre et à Honfleur. Pendant ce voyage, et à la suite d’une conversation confidentielle, Alfred écrivit trois stances qui suffisent à immortaliser le nom de l’ami à qui elles sont adressées. Le plus jeune disciple du grand Cénacle devenait ainsi le dieu d’un autre cénacle inconnu.

Dans le salon d’Achille Devéria qu’il fréquentait assidûment, Alfred de Musset faisait valser alternativement deux jeunes filles du même âge, très jolies toutes deux, aussi aimables, aussi ingénues l’une que