Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/238

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et s’ensevelit dans un rêve chéri, ainsi je m’enfonçais à plaisir dans le sentiment d’une profonde solitude, et je m’enfermais pour douter. J’avais devant moi les deux sièges vides que Smith et Brigitte venaient d’occuper ; je les regardais d’un œil avide, comme s’ils eussent pu m’apprendre quelque chose. Je repassais mille fois dans ma tête ce que j’avais vu et entendu ; de temps en temps, j’allais à la porte, et je jetais les yeux sur nos malles qui étaient rangées contre le mur et qui attendaient depuis un mois ; je les entr’ouvrais doucement, j’examinais les hardes, les livres, rangés en ordre par ces petites mains soigneuses et délicates ; j’écoutais passer les voitures ; leur bruit me faisait palpiter le cœur. J’étalais sur la table notre carte d’Europe, témoin naguère de si doux projets ; et là, en présence même de toutes mes espérances, dans cette chambre où je les avais conçues et vues si près de se réaliser, je