Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/309

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que tu n’oses regarder en face, sera devenu le passé, une vieille histoire, un souvenir confus, ne pourrais-tu par hasard te renverser quelque soir sur ta chaise, dans un souper de débauchés, et raconter, le sourire sur les lèvres, ce que tu as vu les larmes aux yeux ? C’est ainsi qu’on boit toute honte, c’est ainsi qu’on marche ici-bas. Tu as commencé par être bon ; tu deviens faible, et tu seras méchant.

« Mon pauvre ami, me dis-je du fond du cœur, j’ai un conseil à te donner : c’est que je crois qu’il te faut mourir. Pendant que tu es bon à cette heure, profites-en pour n’être plus méchant ; pendant qu’une femme que tu aimes est là, mourante, sur ce lit, et que tu sens l’horreur de toi-même, étends la main sur sa poitrine : elle vit encore, c’est assez ; ferme les yeux et ne les rouvre plus ; n’assiste pas à ses funérailles, de peur que demain tu n’en sois consolé ; donne-toi un