Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/50

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que de coutume. Comme je jouais aux cartes avec sa tante et que je perdais, il n’y eut sorte de malice qu’elle n’employât pour me piquer, disant que je n’y entendais rien et pariant toujours contre moi, si bien qu’elle me gagna tout ce que j’avais dans ma bourse. Quand la vieille dame se fut retirée, elle s’en alla sur le balcon, et je l’y suivis en silence.

Il faisait la plus belle nuit du monde ; la lune se couchait et les étoiles brillaient d’une clarté plus vive sur un ciel d’un azur foncé. Pas un souffle de vent n’agitait les arbres ; l’air était tiède et embaumé.

Elle était appuyée sur son coude, les yeux au ciel ; je m’étais penché à côté d’elle, et je la regardais rêver. Bientôt je levai les yeux moi-même ; une volupté mélancolique nous enivrait tous deux. Nous respirions ensemble les tièdes bouffées qui sortaient des charmilles ; nous suivions au loin dans l’espace