Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, vol. II, 1836.djvu/65

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Elle me regarda d’un air étonné. « Qu’est-ce donc ? » dit-elle. Une inquiétude inexprimable se peignit sur ses traits. Assurément elle ne pouvait me croire assez fou pour lui faire un reproche véritable d’une plaisanterie aussi simple ; elle ne voyait là de sérieux que la tristesse qui s’emparait de moi ; mais plus la cause en était frivole, plus il y avait de quoi surprendre. Elle voulut croire un instant que je plaisantais à mon tour ; mais quand elle me vit toujours plus pâle et comme prêt à défaillir, elle resta les lèvres ouvertes, le corps penché, comme une statue. « Dieu du ciel ! s’écria-t-elle, est-ce possible ? »

Tu souris peut-être, lecteur, en lisant cette page ; moi qui l’écris, j’en frémis encore. Les malheurs ont leurs symptômes comme les maladies, et il n’y a rien de si redoutable en mer qu’un petit point noir à l’horizon.

Cependant, quand le jour parut (qui, dans l’été, se lève de bonne heure), ma chère Brigitte