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LES INTERMITTENCES DU CŒUR 395

organique et devenue translucide des viscères mystérieusement éclairés. Monde du sommeil où la connaissance interne, placée sous la dépendance des troubles de nos organes, accélère le r}^tlime du cœur ou de la respiration, parce qu'une même dose d'effroi, de tristesse, de remords, agit avec une puissance centuplée si elle est ainsi injectée dans nos veines; dès que pour y parcourir les artères de la cité souterraine nous nous sommes embarqués sur les flots noirs de notre propre sang comme sur un Léthé intérieur aux sextuples replis, de grandes figures solennelles nous aipparaissent, nous abordent et nous quittent, nous laissant en larmes. Je cherchai en vain celle de ma grand'mère dès que feus abordé sous les porches sombres ; je savais pourtant qu'elle existait encore, mais d'une vie diminuée, aussi pâle que celle du souvenir ; l'obscurité grandissait, et le vent; mon père n'arrivait pas qui devait me conduire à elle. Tout d'un coup la respiration me manqua, je sentis mon cœur comme durci, je venais: de me rappeler que depuis de longues semaines j'a,vais oublié d'écrire à ma grand'mère. Que devait-elle penser de moi ? « Mon Dieu, me disais-je, comme elle doit êti'e malheureuse dans cette petite chambre qu'on a louée pour elle, aussi petite que pour une ancienne domestique, où elle est toute seule avec la garde qu'on a placée pour la soigner et où elle ne peut pas bouger,, car elle est toujours un peu paralysée et n'ai pas vouikc une seule fois se lever. Elle doit croire que je l'oublie depuis qu'elle est morte, comme elle doit se sentir seule et abandonnée ! Oh. 1 il faut que je courre la voir, je ne peux pas attendre une minute, je. ne peux pas attendre que mon père arrive,, mais où est-ce,, comment ai- je pu oublier l'adresse, pourvu qu'elle me reconnaisse encore ! Comment ai-je pu l'oublier pendant des mois. Il fait noir, je ne trouverai pas, le vent m'empêche d'avancer ; mais voici mon père qui se promène devant moi ; je lui crie : « Où est grand'mère, dis-moi l'adresse. Est-elle bien ? Est-ce bien sûr qu'elle ne manque de rien ? — Ma^is non, me. dit