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CESAIRE 597

Lazare. — Personne ne jouerait près de toi par plaisir.

CÉSAiRE. — Jamais pourtant je ne t'ai inquiété... Jamais je ne t ai parlé de ce petit pré qui s'appelle le Lieu Rosée, et que tu espères un jour pouvoir acheter.

Lazare, pris de crainte. — Ne commence pas avec moi !

CÉSAiRE, emporté malgré lui. — Je n'ai pas essayé de t'en dégoûter, bien que je connaisse, comme si j'y avais vécu, le coin, sur le bord de la route, où les gens du village jettent leurs vieilles boîtes de conserves et leurs assiettes cassées.

Lazare. — Ne commence pas !

Césaire, revenant à lui. — Lazare ! Lazare !... par- donne-moi... je ne dirai plus rien... C'est l'habitude qui m'a repris... Je ne te parlerai que de ce qui te fera plai- sir... Ne t'éloigne pas, Lazare !... Reviens t'asseoir... Si tu savais ce que c'est que de vivre seul !...

Lazare. — Tu avais ta Rose-Marie.

Césaire, presque trejnblani. — Sois bon, mon garçon ! ne parle pas d'elle.

Lazare. — Tu ne l'aimais pas ?

Césaire, avec passion. — Moi !

Lazare. — Il fallait vous mettre d'accord.

Césaire, avec une émotion qui ne se contient plus. — Je te dis que je l'aimais : est-ce que je sais !... Elle m'obéissait trop... elle pleurait trop... Nous nous détestions de toute notre force.

Lazare. — Veux-tu que je te donne un conseil ?... Tâche de la retrouver.

Césaire. — Jamais !... jamais !... Tu ne sais pas ce que tu dis !...

Lazare. — Alors veux-tu que je te donne un autre conseil ?... Renonces-y... Va donc... (Césaire lui fait signe de se taire.) Tu ne veux pas non plus ?... Alors je ne sais plus quoi te dire... je ne peux plus que te consoler. (Tirant sa flûte) Si ça te fait plaisir...

(Il commence à jouer bruyamment. Césaire a pris sa

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