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730 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

résultant du partage et, au moins à mon avis, autrement impor- tante.

J'ai parlé du style sobre, juste, naturel d'Amants. Les person- nages de cette pièce s'expriment comme ils le feraient dans la vie et les diverses scènes de l'action dans laquelle ils nous sont montrés n'en sont que plus éloquentes. C'est par là qu'ils nous touchent, qu'ils nous intéressent et que nous nous reconnais- sons dans eux. Il paraît pourtant que ce style est passé de mode et ne dit plus rien aujourd'hui. Du moins un de nos critiques dramatiques l'a apprécié ainsi :

Il faut encore dire, qu'au moment où Maurice Donnay don- nait Amants, on n'apercevait pas, comme aujourd'hui, que le mouvement réaliste avait substitué l'étude des instincts et des tempéraments au théâtre d'iinagination, de psychologie super- ficielle ; une nouvelle et vaste route venait de s'ouvrir avec Amoureuse, la physiologie allait dorénavant élargir l'étude de la marionnette dramatique ; Henry Bataille venait, et comparez à présent le désespoir de Claudine Rosay avec les héroïnes pante- lantes des grandes comédies de l'auteur de la Femme nue. Amants ne semble plus qu'une œuvre charmante où la passion n'est -qu'à fleur de peau, dont la vie s'est peu à peu tirée.

On ne saurait nier, en effet, tout ce que MM. de Porto-Riche et Henry Bataille ont apporté de neuf dans la peinture des cho- ses de l'amour. On parle dans leurs pièces un langage qu'on ne parle nulle part, et quiconque, dans un salon, s'aviserait de s'ex- primer comme s'expriment leurs personnages, ferait éclater de rire pour tant de recherche et d'affectation. Ce critique drama- tique a bien raison de les admirer sur ce point. Pour inventer des personnages, des situations et jusqu'à un vocabulaire et lais- ser bien loin derrière eux le naturel, la simplicité et la vérité, ils sont des maîtres.

Il y a deux écrits qui étaient merveilleusement de circons- tance à la déclaration de guerre et pendant toute la durée de celle-ci. C'est le Joujou patriotisme de Remy de Gourmont et c'est Uhu-Roi d'Alfred Jarry. C'est sans doute pour cette raison que l'auteur du premier l'a si bien renié, aux applaudissements des patriotes d'antichambre, et que l'éditeur du second, alors qu'il était épuisé et introuvable en librairie, s'est soigneu- sement abstenu de le rééditer. Je n'exagérerai pas les méri-

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