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NOTES 615

observant les adolescents qu’il enseignait du « long regard appuyé que l’on doit aux êtres et aux choses » , il les a^ait trou- vés si riches qu’il eût par le procédé commun fait injure à leur richesse. Il a préféré les assembler en une sorte de ronde 011 chacun passe en lançant sa noie. Unis en apparence par le lien léger de la danse et de la musique, ils le sont aussi par un lien profond. L’observateur qui a cette qualité d’attention passionnée est aussi animateur. Et son livre n’est plus ni chapelet de contes, ni roman selon la formule connue, mais une sorte de cycle lyrique, de chant où des voix que l’on n’avait pas encore enten- dues se répondent. Il n’est pas prose seulement ou seulement poésie, réalité qui tue le rêve, ou rêve qui échappe au réel. Des choses contraires se mêlent dans ces pages de Thierry, comme dans ses notations psychologiques les images du ciel et celles de l’esprit, comme dans sa langue les mots doux et les mots amers, sans vouloir se concilier, ni s’exclure. Outre la force, l’œuvre est d’une exquise fraîcheur. Nul doute que l’on n’y trouve pour le renouvellement de la vision esthétique des indi- cations à retenir. Félix bertaux

NINI GODACHE, par Charles-Henry Hirsch (Flammarion).

Charles-Henry Hirsch fut, sauf erreur, le premier à distribuer ses romans dans un quotidien par tranches hebdomadaires. Ses « lundis » du Journal ont été un exemple suivi par beaucoup. L’histoire des lettres françaises au début du xx^ siècle devra tenir compte de cette coutume et estimer dans quelle mesure elle a contribué à prolonger l’existence du roman naturaliste.

Des romans ainsi découpés ne peuvent en effet. être que naturalistes. Ni les longues analyses du roman psychologique, ni les rebondissements incessants du roman d’aventures ne supportent ce morcellement et ces interruptions- Un roman naturaliste, au contraire, succession de tableaux tour à tour pittoresques, émouvants, dramatiques, se plie aisément à cette présentation étagée. Il y gagne même parce qu’il est forcé de s’alléger, de s’aérer, de sacrifier toutes les inutilités dont il aimait s’encombrer.

D’autre part la nécessité de ménager dans chaque chapitre