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UNE BELLE VUE 3II

présence parce que Longval flattait leurs idées de gran- deur. Il se sentaient beaucoup plus à leur place dans cette belle propriété séculaire que dans leur castel de banlieue. M. de Chaberton connaissait sur le bout des doigts l'historique de Longval et parlait de nos arrière-prédécesseurs comme de gens de sa famille. Il déplorait avec une fureur de chouan le trépas de Louis- Charles-Auguste, marquis de Saint-Clair, mort sur l'écha- faud, maudissait la Révolution, cause du démembrement d'un domaine qui avait englobé toute la colline. Pour un peu, il eût reproché à mon bisaïeul d'avoir acheté à un marchand de biens nationaux le château et quel- ques hectares de terre y attenant.

Semblable à nombre de parvenus qui éprouvent le besoin de s'entourer de vieilleries pour se persuader qu'ils datent eux-mêmes, M. de Chaberton avait la rage des antiquités et la prétention de " s'y connaître. " Il blâ- mait le " vandalisme " des bourgeois qui s'étaient permis de reconstruire le château et de le meubler à neuf.

— Je suis sûr, affirmait-il souvent, que vous possédez des merveilles dans vos greniers. A votre place, j'en tirerais parti, et remiserais les horreurs modernes qui déshonorent vos appartements.

Il eût bien voulu qu'on l'invitât à grimper sous les combles, et ne s'en rapportait pas aux assurances répé- tées que rien n'avait été conservé de l'ameublement primitif,

— Ah ! disait-il, vous n'avez pas idée des trouvailles que l'on fait quelquefois !

Il avait en effet, comme tous ses pareils, la spécialité des trouvailles, et il était fécond en histoires de marchands

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