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SUR LA TERRASSE DE LECTOURE

lauriers-roses et de géraniums pourpres, vient sourdre la fontaine de Diane, que le doux parler populaire, si purement versé dans le secret des corruptions exquises du langage, appelle désormais Fontélie. Je ne m’embarrasse point d’une provenance étymologique où les uns veulent voir la Vierge de Délos, d’autres que cette source était consacrée au soleil. Ne comprennent-ils donc pas que, dans leur désaccord même, ils s’entendent, et rendent un alternatif et fraternel hommage aux divins jumeaux dont l’avènement a fait régner sur le monde une musique plus mâle ? Toujours Diane ! À Nîmes, non loin d’une conque d’eau si profonde et si pure qu’elle semble faite d’air liquide et condensé, son temple mutilé, mais d’une eurythmie par là plus pathétique, s’élève. À Alet, l’abside de l’église en ruines ne fait, dit-on, qu’enceindre et reproduire son primitif sanctuaire. À Lectoure, je la retrouvais plus chaste, plus sévère encore. C’est aux accords de la lyre dorienne que les villes de France ont assemblé leurs remparts. Celle-ci, inébranlablement, repose sur une voûte sacrée.

Entre de hautes murailles nues, derrière un grillage hermétique sur lequel se recroise une double et massive ogive, s’épanche la déesse, ainsi dérobée aux atteintes profanes. J’admire comment une simple précaution d’utilité publique, prise en vue de préserver de toute souillure matérielle une