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À L’AMOUR ET À L’AMITIÉ
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Le soir portait en lui la nuit, ainsi qu’un lait porte sa crème, et il semblait que le moindre cri aigu dût le faire tourner et s’épaissir. Un fermier poursuivait un cheval, comme par plaisir et comme on poursuit un cerceau, en le frappant quand on le rattrappe. L’étang n’avait point de reflet, le soleil point d’ombre, les vitres point de soleil. Amitié, Amour, je pris sa main. Alors son mari parut, et il crut causer de choses sérieuses parce qu’il évita de causer du beau temps, qui était ce jour-là plus souverain que le bonheur.

Elle visita les capitales du monde, et de chacune, en souvenir, rapporta une cuiller d’or. Mais, entre toutes les campagnes, elle ne connaît que New-Jersey, aux fleuves d’argile, aux bosquets a’érable cramoisi, aux baies où la mer s’écaille en lamelles de cuivre, aux étangs bleu-Rachel qui mirent lourdement des pêcheurs en chapeau melon et en maillot garance. Amour, Amitié, je la conduis à ma Province, et vous nous accompagnerez.

Dès Fromental, la station, les jeunes filles viendront vers nous, timides et rieuses. La plus jolie vous paraîtra peut-être aVoir des taches de rousseur, mais c’est qu’avant de l’admirer, Vous aurez regardé fixement le soleil. Elles t’offriront, Amour, des raisins, des pommes cueillies sur l’arbre, et, pour te gauler des noix Vertes, emprunteront au bouvier son aiguillon. À vous, Amitié, elles apporteront des fichus de laine blanche. Vous les