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notes 543

légères, mais qui n'est plus le nôtre. Et sans doute ne l'a-t-il retrouvé si aisément que parce que lui-même en était. Ne vous paraît-il pas que son art essentiellement lumineux, manque un peu de pénombre ? De même sa pensée. Et toute pensée ne faisant jamais que se réfléchir elle-même, faut-il s'étonner que la sienne reste fermée aux sombres grandeurs du christianisme ou, plus généralement, à ce qu'il y a dans l'âme moderne d'indéfini, de " cimmérien " et si l'on veut, de barbare (i). Il y a là un désordre pathétique qui lui échappe, ou peut-être simplement lui déplaît et dont instinctivement il s'écarte. Mais par là même, il se reporte avec plus d'ardeur vers ce qu'il aime : beauté, raison harmonieuse, pensée pure et science, en sorte que cette réaction aboutit à lui constituer une foi, un système nouveau et rival de croyances ".

Ce volume, qui est presque un livre de début, témoigne d'un sens critique aigu, dégagé, fait de culture et surtout d'esprit de finesse et que sert une langue élégante et juste.

J. S.

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��DANS LE JARDIN DE SAINTE-BEUVE, par Georges Grapfe.

J'ai longtemps habité dans la maison de Sainte-Beuve, joué dans ce petit jardin que M. Georges Grappe décrit ; j'étais enfant alors ; le buste de l'auteur des Lundis, glabre, au sourire onctueux, au front demi-couvert par une toque, qu'on voyait dans le vestibule, me semblait celui de quelque prélat. Le nom : Sainte-Beuve, gravé sous le buste, y aidait; je m'éton- nais seulement de cette désinence féminine. Maison et jardin étaient occupés alors par un professeur chez qui j'étais pen- sionnaire ; je n'y suis plus retourné depuis. Avec quelle joie j'y accompagne aujourd'hui M. Grappe ! Avec quelle émotion je reconnais le petit jardin !

L'auteur de ce livre de critique, dans une très ingénieuse

(i) M. Raphaël Cor ajoute en note : Un mot explique tout : M. France est réfractaire à la musique ; il ne la sent pas.

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