Page:NRF 6.djvu/412

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

406 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

pour ainsi dire en cachette comme les premiers sonnets d'un collégien, et elles parurent anonymes et hors com- merce, comme le livre de début d'un auteur sans préten- tions, en avril 1868. Les cent et quelques exemplaires que Patmore envoya à des amis furent reçus très froide- ment et ne lui valurent aucune réponse encourageante. Et, un soir d'hiver, il brûla les cent exemplaires qui lui restaient.

Il faut surtout voir, dans cet holocauste, plutôt que du dépit une intention très touchante : de toutes ses forces, il aspirait désormais à substituer à sa volonté propre celle de son Dieu ; et nous le voyons constam- ment étouffer en lui des aspirations et vaincre des répugnances. Les retraites qu'il fit dans des couvents : à Pantasaph, à Pontypool, où il devait changer ses plus chères habitudes, et soumettre ses lectures et ses médita- tions à un emploi du temps réglé d'avance; ses voyages à Lourdes ; le sacrifice de The Angel in the House quand il crut y trouver des traces de protestantisme, le sacrifice plus grand encore de sa Sponsa Deij — il nous faut voir là des exercices d^obéissance et de renoncement : renon- cement à la gloire mondaine, obéissance jusque dans les plus petites choses.

Mais plus il se détachait et plus il s'élevait, spirituelle- ment, et plus haute montait la flamme de son génie.

A la fin de 1871 il fit un court séjour dans Paris encore ravagé par la guerre civile. En 1874 il loua Heron's Ghyll au duc de Norfolk : le château, constam- ment agrandi, était devenue d'un entretien trop coûteux. Peu après il vendit toute la propriété au duc de Norfolk, pour vingt-cinq mille livres sterling, réalisant un béné-

�� �