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D UNE SECTION D INFANTERIE 475

à l'exercice. Souvenez- vous ! Vous en garderiez la respon- sabilité !

Il s'éloigna, satisfait et plantureux. Le lieutenant restait au garde à vous et le suivait avec un regard appuyé que chaque pas rendait plus lourd. Puis il reprit le chemin de sa troupe. Les gradés avaient fait former les faisceaux. Les hommes revivaient les minutes de leur griserie. Ils se suspendaient à ce moment d'héroïsme. Ils s'en racontaient les phases pour la dixième fois, chacun cherchant à dis- tinguer son rôle personnel et ne parvenant pas à l'isoler dans la folie de l'ensemble. Ils se tutoyaient en se claquant les épaules les uns les autres. Ils partageaient leurs quarts de boule et levu^ bidons de vin.

Une amertume hautaine saisit l'oflScier. Il se redressa brusquement dans sa tunique, s'arrêta et se donna un instant pour contempler son œuvre.

Il pensait à son capitaine, à la tristesse persistante et à la vanité de son métier dans une mortelle garnison de l'Ouest.

A ce moment, le sous-ofEcier qui était commis dans une administration s'avança sur im signe qu'il lui fit, et s'arrêta militairement à quatre pas de son supérieur.

— Les hommes sont-ils reposés ? Personne de fourbu ?

— Mon lieutenant, la section est prête à repartir.

— Faites rompre les faisceaux.

Et quand l'homme se fut éloigné, il se dit :

— La section..? Elle n'existait pas, ce matin !

Les verres de son binocle agrandissaient le triste regard de ses yeux jaunes. D'un mouvement familier de l'index et de l'annulaire, le médium replié, il rajusta ses lorgnons dont le ressort l'avait légèrement blessé, pendant qu'il

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