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première paroi des maisons subsistantes (ainsi qu’on devrait supposer), mais bien la dernière des disparues. Elle montrait sa face interne. On voyait, à différents étages, des murs de chambres où les tentures collaient encore ; çà et là l’amorce du plafond ou du plancher. Auprès des murs des chambres, tout au long de la paroi, on distinguait un espace suspect par où s’insinuait, vermiculeux, une espèce de tube digestif : la descente des cabinets, laissant paraître la répugnante rouille des immondices. A l’angle des plafonds, les tuyaux à gaz avaient laissé des marques poussiéreuses... Mais le plus inoubliable, c’était encore le mur lui- même. On n’avait pu déloger l’opiniâtre vie de ces chambres. Elle y était encore ; elle se retenait aux clous qu’on avait négligé d’enlever ; elle prenait appui sur un étroit morceau de plancher ; sous ces encoignures où se formait encore un petit peu d’intimité, elle restait blottie. On la retrouvait dans les couleurs que d’année en année elle avait changées, le bleu en vert chanci, le vert en gris, et le jaune en un blanc rance. Mais on la retrouvait également aux places conservées plus fraîches, derrière les glaces, les cadres, les armoires ; elle avait inscrit leur contour à l’aide de toiles d’araignées et de poussière. On la retrouvait aussi dans chaque écorchure, dans les ampoules que l’humidité avait soufflées au bas des tentures ; elle tremblait avec les lambeaux flottants et transpirait