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676 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

d'elles, ou bien rejetant la tête en arrière, se grattent l'épaule de la pointe de la corne. La balle de ma carabine Lebel frappe la pierre entre les pattes de l'une d'elles, que les éclats, le bruit, un instant, étourdissent. Avant que j'aie pu armer à nouveau, elle a bondi des quatre pieds et disparaît. Nous nous lançons au galop derrière elle, au travers des fourrés où je ne vois rien que des herbes, des épines, des feuilles brûlées, mais où notre Galla, d'un œil sûr, discerne les traces des sabots légers. Sur le roc où tantôt l'antilope était dressée, je distingue l'éraflure de la balle d'acier — " Ah, c'était un beau coup ! ", me dit sans rire l'interprète en passant le doigt dans le trou. Pour un Abyssin peut être, aux mains de qui le fusil n'est qu'un instrument à faire de la fumée et du bruit!... — Le Galla, cependant, nous presse de le suivre. Haletante as- cension ! Il ne doute de rien, le gaillard ; il court comme en terrain plat, s'avance jusqu'à l'extrême bord de la falaise en s'accrochant des mains et des orteils à la paroi. Ma carabine m'embarrasse, mon casque aussi. Je suis à bout de souffle. Je continue néanmoins, mais au sommet fais halte. L'ample vallée du Dabo s'ouvre à mes pieds. Je suis des yeux la rivière qui la traverse. Les gros blocs de grès dont elle est encombrée luisent parmi les buissons jaunes. De la base à la cime, les oliviers recouvrent la montagne d'en face qui élève sur le ciel ses lignes pures, nettes et sans fantaisie. Au fond, s'étend la plaine de Bossette, lumineuse, comme rosée et toute criblée des taches rondes qu'y fait l'ombre des mimosas. L'éperon rugueux d'un massif caché par la chaîne qui nous porte, s'y enfonce et referme l'horizon.

Quelque temps, je suis la crête où, avec tant de peine,

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