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les conquêtes du commandant belormeau

— Donnez-moi votre papier, dit-elle, je vais le porter à mademoiselle.

Elle fit un mouvement pour refermer la porte au nez des intrus ; mais l’officier étendit vivement son sabre.

— Non pas, s’exclama-t-il, j’ai les pieds gelés ; je veux bien attendre, mais au coin d’un bon feu.

— Du feu, je n’en ai qu’à la cuisine, elle ne serait pas à la hauteur.

— J’irai volontiers à la cuisine ; voyons, ma bonne femme, déridez-vous.

De plus en plus renfrognée, au contraire, Benoîte fit entrer les deux hommes, leur passant des chaises de bois blanc, devant l’âtre.

— Voilà une bourrée, arrangez-vous, dit-elle, renonçant définitivement aux cérémonies.

Elle monta l’escalier quatre à quatre.

Mlle Herminie, ayant perçu le bruit de l’explication, l’attendait avec impatience.

— Qu’y a-t-il, Benoîte ?

— Une affaire extraordinaire, mademoiselle ; une chose comme on n’en a jamais vu ! Les deux militaires veulent loger chez nous !

— Mais cela ne se peut pas, fit la vieille demoiselle épouvantée ; je suis une femme seule ; cette prétention est inadmissible et inconvenante.

— Je le leur ai expliqué ; mais il paraît que c’est le maire qui a fait ce beau coup-là… Il nous en veut, sûrement ; je le disais à Mademoiselle que ce Faverger lui faisait des yeux comme des pistolets.

— Je ne sais pas, ma fille. Pourquoi m’en voudrait-il ? Je ne lui ai jamais fait d’offense.

— Mademoiselle n’a pas voulu le recevoir ; les hommes sont tous comme ça : ils veulent être reçus !

— Mais j’y songe, reprit Mlle Herminie, en prenant sa caline à deux mains, dans un geste d’anxieuse perplexité, autrefois, quand les passages de troupes étaient plus fréquents, c’est toujours à l’hôtel de