Page:Nau - Force ennemie.djvu/132

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maine dans une sorte de torchon de laine noire qui a souffert du voisinage de bougies allumées et coulantes. Léonard offre gracieusement le bras à la bonne dame. Celle-ci pousse de petits cris et veut savoir où l’on va « comme ça ».

— Nous allons pronmener en voiture, flûte mon gardien.

— Pas avec des Monsieurs que je connais pas, proteste la folle, ’y a des oubliettes dans les voitures et on y jette les vieilles femmes comme moi. J’aime mieux aller voir les oiseaux de fer-blanc sur le toit du grenier ; ils chantent comme des harmonicas !

— C’est là que nous irons avec le fiâque, par un chemin montant qui tourne, susurre Léonard.

— C’est-y bien vrai ?

La mère Charlemaine fait deux pas, à demi rassurée. Robertine lui dit : « Au revoir ! » en lui donnant deux bonnes tapes dans le dos en guise de marques d’amitié. M. Frédéric respire. Mais la pauvre femme se retourne soudain et sanglote, comme prise d’un pressentiment :

— Tu m’embrasseras-t-y pas, Frédéric ? Des fois que je reviendrais… que tard ?

— Allons bon ! Voilà que ça la reprend, les bêtises ! voilà qu’elle va encore me persécuter de ses vilaines gestes, clame M. Frédéric. Arrêtez-la. Mais regardez-moi ça. Est-ce assez déjeté pour soixante ans ! Que je connais des jolies personnes de cet âge qu’on dirait des jeunes filles, et fichue comme ça,