Page:Nau - Force ennemie.djvu/232

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mais quel singulier regret me tenaille tout à coup le cœur, mon cœur qui ne veut aimer qu’Irène ! Je m’aperçois que j’éprouve une sorte d’affection grotesque et assez profonde, — (de quelle nature ? ce serait sans doute difficile à expliquer ; — elle contient des éléments malpropres et d’autres presque tendres, — tendres ? oui, jusqu’à un certain point, —) une affection réelle pour… Mme Robinet !

Ce sentiment provient, sans doute, du véritable courage déployé depuis quelque temps par cette extraordinaire bonne femme qui a été prise d’une inexcusable toquade pour ma vilaine personne ridicule et mal bâtie. Elle a beau redouter comme des tarasques les ogres Barrouge et Le Lancier, ressentir un effroi qui lui donne un teint gris cendré dès que l’un de ces tyrans syracusains élève la voix, même assez loin d’elle, — s’épouvanter à la seule idée d’enfreindre un de leurs ordres au point d’être obligée de s’asseoir n’importe où, n’importe sur quoi, par terre au besoin, lorsqu’elle se voit en défaut, — elle a tout bravé pour me prouver sa très blâmable passion. Ç’a été plus fort qu’elle ! Aux heures les plus mal choisies, à certains moments où il était dangereux de se trouver dans mes parages, les deux mauvais diables rôdant aux environs, elle est arrivée dans ma chambre, suante d’émoi, n’ayant ordinairement que peu de minutes à elle, — a découvert les prétextes les plus confondants et les plus ingénieux pour éloigner mes gar-