Page:Nau - Force ennemie.djvu/297

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obscure mais intelligible théorie poétique. C’est une des rares fois que je l’aie entendu dire quelque chose de sensé. Et il aime Baudelaire ! Ah ! tant pis pour le surhumain poète mais tant mieux pour ce lamentable polichinelle de Nigeot ! Cette admiration passionnée pourra peut-être, avec le temps, rendre tolérable la puanteur de son crétinisme. Je sais, du reste, qu’à Vassetot déjà, le gâteux Oswald-Norbert n’était guère préoccupé que du dieu auteur des Fleurs du mal et ce fut mon unique raison de sympathie pour le « Chinois à la gelée de framboises ».

Mais Kmôhoûn me talonne. Il faut… absolument oui ! que je persécute les deux ex-internés guéris ou affirmés tels :

— J’ai appris, dis-je au barde mandchou, que vous allez au Chili…

— Appr… appris, co… comment ? bredouille Nigeot. Nous avez entendu parler !

Toute sa figure se sillonne de petits ravins jaunes et rouges.

— Ah ! cochonnerie ! s’écrie-t-il. Les paroles, c’est encore de la mécanique ! Ça fatigue, d’abord, à prononcer, — et puis c’est surpris par les Autres, les féroces Autres ! Les pauvres Moi (et Magne est un Moi, tandis que vous êtes un cochon, un saligaud d’Autre), — les pauvres Moi (nous sommes peut-être cent cinquante en tout sur ce cochon de globe terrestre !) — pourquoi ne peuvent-ils se communiquer leurs pensées sans faire des efforts de larynx !