Page:Nau - Force ennemie.djvu/319

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mouvements identiques à ceux que mon instinctive volonté lui communique d’ordinaire. Puis il diminue et disparaît… Me voici flottant, vague et impondérable, dans une atmosphère de plus en plus bleue ; je traverse des zones lumineuses où tremblent de longs rayons bleus, verts, argentés, — d’or blême, d’opale blondie. C’est splendidement beau, mais, malgré mon état immatériel, je suis encore « trop près de la vie terrestre » pour ne pas souffrir de l’horreur du gouffre et de cette sensation que je suis perdu en le sublime inconnu de l’Infini. Qui me retrouvera dans cette immensité, qui aura pitié de moi ? Une voix me rassure : est-ce la voix de Jeanne Stolz, de la femme jadis aimée que me destinait le généreux Elzéar ? non, et pourtant !… Les paroles qu’elle prononce sont de celles (trop sublimes) que comprend faiblement ma médiocre intelligence ; je ne puis m’en faire qu’une très inexacte, très incomplète, très lointaine idée sans doute obscurcie par de grossiers contre-sens, mais je devine, me semble-t-il bien, que « certaines âmes humaines sont, par exception, trop suavement belles pour n’exister qu’enfermées dans leur triste prison de chair ; que chacune d’elles a son double, pareil aux plus scintillantes étoiles, en d’éblouissantes constellations invisibles pour le monde terrestre… et que… je flotte vers le reflet stellaire d’Irène. Très vite je franchis des espaces énormes dans une lumière de plus en plus adorablement troublante. La nuit du vide n’existe plus pour moi