Page:Nerval - Le Rêve et la Vie, Lévy, 1868.djvu/147

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

plain-chant, qui prédit suffisamment le sort du malheureux soldat.

Quoi de plus charmant que la chanson de Biron, si regretté dans ces contrées :

Quand Biron voulut danser, — Quand Biron voulut danser, — Ses souliers fit apporter, — Ses souliers fit apporter ; — Sa chemise — De Venise, — Son pourpoint — Fait au point, — Son chapeau tout rond ; — Vous danserez, Biron !

Nous avons cité deux vers de la suivante :

La belle était assise — Près du ruisseau coulant, — Et dans l’eau qui frétille, — Baignait ses beaux pieds blancs : — Allons, ma mie, légèrement ! — Légèrement !

C’est une jeune fille des champs qu’un seigneur surprend au bain comme Percival surprit Griselidis. Un enfant sera le résultat de leur rencontre. Le seigneur dit :

« En ferons-nous un prêtre, — Ou bien un président ?

— Non, répond la belle, ce ne sera qu’un paysan :

— On lui mettra la hotte — Et trois oignons dedans… — Il s’en ira criant : — Qui veut mes oignons blancs ?… » — Allons, ma mie, légèrement, etc.

Nous nous arrêtons dans ces citations si incomplètes, si difficiles à faire comprendre sans la musique et sans la poésie des lieux et des hasards, qui font que tel ou tel de ces chants populaires se grave ineffaçablement dans l’esprit. Ici ce sont des compagnons qui passent avec leurs longs bâtons ornés de rubans ; là des mariniers qui descendent un fleuve ; des buveurs d’autrefois (ceux d’aujourd’hui ne chantent plus guère), des lavandières, des faneuses, qui jettent au vent quelques lambeaux des chants de leurs aïeules. Malheureusement on les entend répéter plus souvent aujourd’hui les romances à la mode, platement spirituelles, ou même franchement incolores, variées sur trois à quatre thèmes éternels. Il serait à désirer