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lorely.

— Monsieur, avec plaisir.

— Monsieur, à tantôt.

Je me promène impatiemment dans la bonne ville de Strasbourg. Je rencontre Alphonse Royer, qui arrivait de Paris, et partait pour Munich à quatre heures. Il me témoigna son ennui de ne pouvoir dîner avec moi et aller ensuite entendre la belle madame Janick dans Anna Bolena (c’était la troupe allemande qui jouait alors à Strasbourg). J’embarque enfin mon ami Royer, en me promettant de le rencontrer quelque part sur cette bonne terre allemande que nous avons tant de fois sillonnée tous deux ; puis, avant six heures, je me dirige posément, sans trop me presser, chez M. Elgé, songeant seulement qu’il est l’heure de dîner, si je veux arriver de bonne heure au spectacle. C’est alors que M. Elgé me dit ces mots mémorables derrière un grillage :

— Monsieur, M. Éloi père vient de me dire… que M. Éloi fils était un polisson.

— Pardon ; cette opinion m’est indifférente ; mais payez-vous le billet ?

— D’après cela, monsieur, nullement… Je suis fâché…

Vous avez bien compris déjà qu’il s’agissait de dîner à l’hôtel du Corbeau et de retourner coucher à Bade à l’hôtel du Soleil, où était mon bagage, le tout avec environ un franc, monnaie de France ; mais, avant tout, il fallait écrire à mon correspondant de Francfort qu’il n’avait pas pris un moyen assez sûr pour m’envoyer l’argent.

Je demandai une feuille de papier à lettre, et j’écrivis couramment l’épître suivante :


À M. Alexandre Dumas, à Francfort


(En réponse à sa lettre du *** octobre).


En partant de Baden, j’avais d’abord songé
Que par monsieur Éloi, que par monsieur Elgé,