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changé, la poésie était revenue en France avec la liberté, avec la pensée, avec la vie morale que nous rendit la restauration. »

Un enthousiasme général accueillit ce jeune homme, la veille inconnu, qui ressuscitait et renouvelait à la fois la poésie, qui répondait aux voix intérieures retentissant dans les profondeurs des âmes, à la manière de ces échos qui embellissent les chants qu’ils répètent ; qui venait enfin, la croix à la main, chasser l’antique mythologie de son domaine et évangéliser la poésie en renversant les divinités vermoulues du haut de leurs poudreux autels. M. de Lamartine, en cédant aux penchants de son cœur, avait accompli la révolution que le grand évêque de Meaux avait désirée et devinée. Il avait banni de la poésie les sentiments et les images du paganisme, à la manière du christianisme des premiers âges qui, plantant la croix sur les temples des idoles, en faisait des églises qu’il consacrait au vrai Dieu. Il a dit de lui-même : « Avant moi, il fallait avoir un dictionnaire mythologique sous son chevet si l’on voulait rêver des vers. Je suis le premier qui ait fait descendre la poésie du Parnasse, et qui ait donné à ce qu’on nomme la muse, au lieu d’une lyre à sept cordes de convention, les fibres mêmes du cœur de l’homme touchées et émues par les innombrables frissons de l’âme et de la nature[1]

À l’encontre de la plupart des auteurs du dix-hui-

  1. Préface des Méditations, édition de 1849.