Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/444

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visiter Athènes, sa véritable patrie ; car c’est à lui bien plus qu’à Béranger qu’il appartenait de dire :


Oui, je fus Grec, Pythagore a raison.
Sous Périclès, j’eus Athènes pour mère ;
Je visitai Socrate en sa prison ;
De Phidias j’encensai les merveilles ;
De l’Ilissus j’ai vu les bords fleurir,
J’ai sur l’Hymette éveillé les abeilles :
C’est là, c’est là que je voudrais mourir.


Ce que Courier avait été pour l’empire, il devait le devenir pour la monarchie. En face de l’empire, il s’était posé en philosophe ami de l’humanité, quoiqu’il eût dans l’esprit une malignité et une sécheresse exclusive de la sensibilité ; mais c’était un moyen de contrôler, d’une manière au moins indirecte, l’empereur et l’effroyable consommation d’hommes qu’il faisait sur ses champs de bataille : on se souvient qu’à la même époque Béranger écrivait sa chanson sur le roi d’Yvetot. Il s’était posé dans les armées impériales en artiste, quoiqu’il eût dans le caractère une roideur impérieuse très-peu compatible avec le laisser-aller et la facilité de la vie des arts ; mais c’était un moyen de contrôler cette vie de discipline et de régularité que l’empereur avait imposée à la France. Quand vint la restauration, il changea de rôle sans changer de caractère. La liberté de la presse ouvrait une belle carrière à son esprit naturellement chagrin et mécontent ; il devait être conduit à en profiter pour verser sur le papier le fiel qu’il avait dans le cœur.