Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/46

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pour les vues d’ensemble. Il y a trois ou quatre grandes prévisions de Joseph de Maistre qui peuvent passer pour des prophéties, et qui sont en effet des prophéties, celles de la logique de l’histoire et de la philosophie éclairée par le catholicisme. Il ne se trompe pas plus sur le dénoûment de la lutte que sur le caractère de la lutte. Il a annoncé à la fois, prévision dont la première partie est d’autant plus remarquable qu’elle est en faveur d’une cause dont il était l’adversaire déclaré, que la force de la révolution serait, pour un temps, irrésistible en Europe et que, cependant, elle ne fonderait rien en France ; que la république ne subsisterait pas, et qu’on verrait la résurrection de la monarchie. Nous ne parlons pas de sa prédiction sur le triomphe des idées catholiques en France, car le sens logique de l’historien était ici illuminé par la foi du chrétien. Encore pourrait-on dire cependant que, si le catholicisme ne doit pas périr dans le monde, il peut se retirer d’un pays particulier, comme ces astres qui disparaissent de notre ciel sans s’éteindre, et s’enfoncent, en suivant l’invisible doigt qui les guide, vers un but inconnu. Or, le comte de Maistre, résumant les dernières phases de cette longue lutte entre le christianisme et le philosophisme, annonçait à ce dernier, dès 1796, qu’il était vaincu en France. Il était en effet vaincu par les échafauds qu’il avait dressés et par le sang qu’y avait répandu le sacerdoce, revenu aux jours du christianisme héroïque ; il l’était par tout ce qu’il avait fait et par tout ce qu’il n’avait pu