Page:Nettement - Histoire de la littérature française sous la restauration 1814-1830, tome 1.djvu/85

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tous dans sa personne domestique », voilà les anneaux de la chaîne des pouvoirs telle que la déroule l’auteur de la Législation primitive. Sa théorie laisse peu de place aux libertés politiques et civiles, il est vrai, et il se montre bien plus préoccupé des dangers de l’absence du pouvoir que de ceux des excès de pouvoir ; mais cette préoccupation se comprend lorsque l’on songe aux temps que la France venait de traverser. Le despotisme d’un seul est une liberté relative pour les peuples qui sortent de l’anarchie.

Ce despotisme se présentant sous sa forme la plus glorieuse, cheminait vers son but, et, pendant que de Maistre, Chateaubriand, Bonald, conduisaient avec éclat la réaction des idées, des événements se préparaient qui allaient imposer silence aux discours, pour laisser plus de place à l’action. Avec un peu d’attention, on découvre qu’à l’époque même où M. de Bonald écrivait la Législation primitive, il n’avait plus la liberté complète d’exposer sa pensée, car il prend soin, dans plusieurs passages, de rappeler qu’il s’est abstenu, depuis longtemps, d’écrire rien de politique, et il déclare d’avance « qu’on ne pourrait, sans une extrême injustice, le taxer d’intentions et d’opinions. »

La politique commençait à être interdite aux penseurs par le pouvoir nouveau ; ils se réfugiaient dans l’histoire, et on les voit, comme cela arrive quand le temps est à l’orage, ou se taire, ou placer des paratonnerres sur leurs livres.

L’auteur de la Législation primitive, voulant étudier