Page:Nichault - Anatole.djvu/198

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moins de huit jours, l’histoire s’en est tellement répandue qu’elle est l’objet de toutes les conversations. Les hommes, piqués de n’être pour rien dans les torts d’une aussi jolie personne, se plaisent à les exagérer ; les femmes en parlent avec tout le mépris qui sert à déguiser l’envie. L’une se promet bien de ne pas lui rendre son salut, si jamais elle la rencontre ; l’autre court chez son amie pour la prévenir du danger de recevoir une folle qui vient de s’afficher ainsi ; et lorsque quelque âme charitable ose demander la cause de ces mesures rigoureuses :

— Quoi ? s’empresse-t-on de lui répondre, vous ignorez que cette belle marquise de Saverny, qu’on voulait nous donner pour modèle, et qui, disait-on, était insensible aux charmes de l’amour, menait tout doucement quatre intrigues à la fois ? Vivent ces beautés timides pour savoir bien tromper leurs admirateurs ! Ceux de la marquise en seraient peut-être encore dupes, si l’un de ses favoris n’avait eu la maladresse de laisser deviner son bonheur. On va jusqu’à dire que la preuve de ce bonheur oblige la marquise à faire une assez longue absence. Enfin, rien ne manque au scandale de ses aventures galantes ; et pour peu qu’elle aime la célébrité, sa vanité doit être satisfaite.

À ces calomnies on joignait les plus injurieux commentaires ; mais ces bruits n’étant pas encore parvenus à Versailles, Valentine reçut une lettre de la dame d’honneur de la reine, qui lui annonçait