Page:Nichault - Ellenore t1.djvu/18

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ractère noble, des sentiments distingués qui lui attiraient l’estime des personnes les plus supérieures en tous genres ; je citai, à l’appui de cette assertion, tant de noms honorés et célèbres, que j’obtins une sorte de triomphe sur la malveillance des trois Euménides de salon, acharnées à la réputation de la belle Ellénore.

Un de ses habitués, témoin de cette petite scène, la lui rapporta, en exagérant mon dévouement pour elle. Cette circonstance, quoique de très-peu d’importance, décida de son amitié pour moi. À dater de ce moment, elle ne perdit pas une occasion d’employer le crédit de ses amis puissants, en faveur de mes parents émigrés. Je lui dus la rentrée en France de mon oncle, le marquis de B…, brave officier de l’armée de Condé ; et ce fut avec un vrai plaisir que je la retrouvai à Londres, lors du voyage que je fis après la mort de mon père. Le hasard m’avait fait retenir un appartement dans la même maison qu’elle habitait dans Grosvenor-street. C’est là, à la suite de charmantes soirées passées avec plusieurs personnes distinguées de France et d’Angleterre, qu’Ellénore me raconta son histoire.

— J’ai toujours été calomniée, me dit-elle ; ma situation m’accuse, je mourrai sans être connue, et l‘idée d’être confondue, dans l’opinion des gens qui m’ont seulement entrevue, avec les femmes qu’ils ont le droit de mépriser, m’afflige au dernier point. C’est une faiblesse, sans doute, ajouta-t-elle, l’estime de mes amis devrait me suffire ; mais celle-là même a besoin d’être soutenue par de bons témoignages pour me survivre. Vous qui vous amusez à écrire des malheurs imaginaires, promettez-moi de publier un jour le récit véridique de ceux qui m’ont conduite, à travers tant