Page:Nichault - Laure d Estell.djvu/273

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idées s’emparent de son âme ; et chaque objet qui s’offre à sa vue, prend la forme de celui que peint son imagination. Ô vous !… que l’infortune ou l’amour malheureux a forcés de parcourir les bois dans l’ombre de la nuit !… rappelez-vous les tressaillements que vous ont fait éprouver le vol d’un oiseau, le léger bruit d’une branche qui tombe, et le sentiment de crainte que ne peuvent surmonter le courage ni la raison, vous comprendrez alors la cause du tremblement de Laure. En arrivant au bord de l’île, elle fut obligée de s’appuyer contre un arbre ; sa faiblesse lui faisait redouter de ne pouvoir aller plus loin. Mais l’inquiet désir d’apprendre son sort ranimant ses forces ; allons, dit-elle, cessons d’outrager le ciel par tant de défiance ; il a daigné sauver les jours de mon enfant ; peut-être veut-il aussi le bonheur de ma vie !… En disant ces mots, elle s’avance vers le tombeau, se prosterne à genoux, croit entendre la voix de Henri lui reprocher son infidélité, et s’éloigne aussitôt le cœur déchiré de remords… Un moment après, elle s’approche de la colonne, pose sa lampe sur une des marches, aperçoit une serrure du côté de la base, introduit la clef, ouvre, et voit… Ô crime affreux ! Une épée encore toute teinte de sang… Ces mots gravés dessus :

James a plongé ce fer dans le sein de Henry.