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Page:Nichault - Marie.djvu/46

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prédiction s’accomplir, car ma vie n’était plus à moi : un gage bien cher m’ordonnait d’en prendre soin, et je résolus de le soustraire au courroux de mon père. Pendant ce tems il accordait ma main au marquis de Verneuil. Dans l’horreur que ce lien m’inspirait, je fis consulter secrètement sur les moyens d’y opposer l’acte qui m’unissait à Albert ; mais cet acte dépourvu du consentement de mon père était nul devant la loi, et m’en faire un droit, c’était publier mon déshonneur. En proie à tant de tourments, une fièvre ardente s’empara de moi, je refusai tout secours, je dévorai mes souffrances, et c’est presque mourante que je mis au monde une fille… l’objet de mes remords constants… (Elle se cache le visage.)

LE BARON, tendrement.

Malheureuse mère ! pourquoi ne m’avoir pas confié ce secret ?

LA MARQUISE.

Absent depuis deux ans, vous ne deviez revenir que pour mon mariage, et je n’avais pour guide, pour secours que cette femme qui, placée près de moi par mon père, était l’unique confidente de mes peines ; je ne puis l’accuser, et pourtant c’est à sa prudence, à son zèle que je dois tous mes maux. Ne sachant que résoudre en cet instant cruel, et se voyant à chaque minute au moment d’être surprise par l’arrivée de mon père, mademoiselle Dupré n’hésita pas à me dire qu’il fallait éloigner mon enfant… J’eus la faiblesse d’y consentir… je ne l’ai jamais revue.