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Page:Nichault - Un mariage sous l empire.djvu/274

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drale s’était fait entendre, le peuple, réuni dans les rues, sur les places publiques, attendait avec impatience le premier coup de canon qui devait annoncer la délivrance de l’impératrice, et ce vingt-deuxième coup qui devait proclamer la naissance du fils de la victoire. De quelles acclamations cette nouvelle fut accueillie ! Quel garant pour la paix ! pour la durée d’un gouvernement fondé par la gloire ! C’était un délire général, car l’ennemi même de ce gouvernement y voyait la conservation de ses fils, la sûreté de sa fortune et le repos de son pays.

Lorsque M. de Lorency revint du château, il trouva Ermance chez M. de Montvilliers ; tous deux l’attendaient avec impatience, pour savoir la vérité sur le danger qu’avait couru l’impératrice ; et puis l’on était si curieux de connaître les différentes impressions qu’avait dû éprouver l’empereur pendant cette pénible nuit !

— Je vous avouerai, dit Adhémar, que l’habitude de voir le conquérant m’avait fait douter de l’homme sensible ; j’étais loin d’imaginer que l’empereur serait aussi violemment ému que nous l’avons tous vu pendant les douleurs qui ont failli coûter la vie à l’impératrice : car vous saurez que Dubois s’étant cru un moment dans l’obligation de sacrifier la mère ou l’enfant, a été consulter l’empereur, et que celui-ci s’est vite écrié : « Sauvez la mère ! ne pensez qu’à la mère ! oubliez que c’est l’impératrice ; faites comme si vous accouchiez une bourgeoise de la rue Saint-Denis. Mais cet homme, que la vue d’un champ couvert de morts n’a jamais fait pâlir, s’est trouvé sans force contre le danger de sa femme ; il a été obligé de s’éloigner d’elle, ne pouvant résister à l’excès de l’émotion. Corvisart m’a dit que l’anxiété où s’est trouvé l’empereur depuis son court entretien avec M. Dubois jusqu’au moment de la délivrance, ne peut se peindre : il était pâle d’effroi lorsqu’il s’est élancé, du cabinet de toilette où il attendait, dans la chambre de Marie-Louise. Enfin, une bataille perdue ne l’aurait pas mis dans un état semblable. On a d’abord cru l’enfant mort ; mais quand, après sept minutes, il a poussé un cri, l’empereur a couru l’embrasser avec une joie délirante.

— On ne lui supposait pas de si tendres sentiments, dit Er-