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HUMAIN, TROP HUMAIN


sible, s’il a fait oublier le maître et s’il a donné l’illusion qu’il racontait une histoire de sa vie ou vivait quelque chose actuellement. À la vérité : s’il n’est rien qui vaille, chacun maudira son bavardage par lequel il nous parle de sa vie. Il faut donc qu’il s’entende à captiver l’imagination de l’auditeur. C’est par là que s’expliquent à leur tour toutes les faiblesses et les folies de la « virtuosité ».

173.

Corriger la fortune. — Il y adans la vie des grands artistes de fâcheuses conjonctures, qui forcent par exemple le peintre à n’esquisser son tableau le plus important qu’à l’état d’idée fugitive ou forcèrent par exemple Beethoven à ne nous laisser dans mainte grande sonate (comme celle en si majeur) que l’insuffisante réduction pour piano d’une symphonie. Ici l’artiste qui vient plus tard doit chercher à corriger après coup la vie du grand homme : c’est ce que ferait par exemple celui qui, maître de tous les effets d’orchestre, éveillerait à la vie pour nous cette symphonie tombée à la mort apparente du piano.

174.

Réduire. — Beaucoup de choses, d’événements ou de personnes ne supportent pas d’être traités